Rencontre avec Pascale JEUILLY-FORGUE
Pascale Jeuilly Forgue, bonjour, vous êtes médecin généraliste et sophrologue.
Dans le cadre de votre travail, vous accompagnez souvent vos patients pour desdouleurs chroniques. Pouvez-vous nous définir de quoi il s’agit en quelques mots ?
Il s’agit d’une douleur qui s’est installée, qui résiste aux antalgiques, va durer dans le temps au-delà de 3 mois et souvent s’amplifier pour finir par prendre toute la place dans la vie du patient et capter son attention en permanence.
Quelles sont les pathologies classiquement associées aux douleurs chroniques ?
Il y a les douleurs mécaniques de type arthrose, les douleurs inflammatoires des maladies rhumatologiques, telles que la polyarthrite rhumatoïde et la spondylarthrite ankylosante et les douleurs cancéreuses.
On distingue également les douleurs neurologiques telles que les lombosciatalgies, les névralgies cervico-brachiales et les douleurs de la sclérose en plaques mais aussi les fibromyalgies… La liste est longue.
Quelles situations observez-vous ?
Lorsqu’il consulte, le patient attend souvent une solution immédiate relativement à la douleur chronique.
Son parcours est essentiellement médicamenteux : il passe souvent par un centre antidouleur ou un service spécialisé en rhumatologie.
Lorsque cela ne fonctionne pas il faut pouvoir lui proposer une alternative dans le cadre d’une prise en charge globale.
Quelles sont les conséquences de la douleur chronique sur la vie du patient ?
Le patient atteint vit une souffrance permanente, qui capte son attention, happe ses forces et épuise ses énergies.
Cela a souvent des répercussions sur sa vie sociale aux plans professionnel, familial et amical. Il se sent parfois enfermé dans un « corps de douleur ». La question d’une prise en charge globale se pose alors avec acuité. Que peut-il mettre en place dans sa vie pour une conduite plus autonome dans la gestion de la douleur ?
En quoi la sophrologie est-elle une aide possible et quelles perspectives ouvre t’elle aux patients ?
Cette question des conséquences sociales, familiales, professionnelles et psychiques offre aux sophrologues un espace de prise en charge aux cotés des équipes médicales pour aider le patient à mieux vivre avec ce corps douloureux dans le respect de ses projets de vie.
Le retentissement de la douleur et son envahissement progressif, on l’a dit, appauvrissent progressivement les énergies disponibles chez le patient.
Celui-ci doit continuer à vivre, à se réaliser et se projeter dans l’avenir pour apprendre à composer avec cette douleur.
Il s’agit aussi parfois de donner du sens à sa douleur pour la voir autrement, l’incorporer à sa réalité et se réapproprier son corps pour revenir à la sensation.
Ainsi, une patiente me disait ce matin, en parlant d’une douleur qui évoluait depuis plus d’un an : « J‘ai toujours mal mais je n’y pense plus. Je me suis reconnectée à d’autres sensations dans mon corps… à celles qui sont agréables » !
La prise de conscience par la sophrologie dans le respect de la réalité objective du patient et sa participation active par le biais de l’entraînement ont un retentissement psychologique et énergétique important.
Le sophrologue accompagne ces prises de conscience, favorise une acceptation progressive souvent indispensable et éclaire les perspectives futures dans le respect des valeurs et de l’historicité du patient, lui offrant de reprendre en main le cours de sa vie non pas seulement malgré mais avec la douleur.