Journée professionnelle Juin 2022

Sophrologie et harcèlement

Le 16 juin 2022 de 17h à 20h, la S.F.S a organisé une rencontre professionnelle, qui a réuni 16 participants (15 participantes et un participant) et 3 animateurs.

Nous avons travaillé dans une bonne énergie vivantielle sur cet intéressant sujet durant trois heures qui nous ont paru bien courtes et c’est avec plaisir que nous vous communiquons le fruit de nos échanges.

Animateur: Jean-Pascal Cabrera, sophrologue membre du conseil d’administration de la SFS.

Modérateures: Isabelle Fontaine et Anne Galouzeau de Villepin, membres du conseil d’administration de la SFS.

Rapporteuse : Corinne Goffaux-Dogniez, sophrologue.

Synthèse de la table-ronde

Animateur
Jean-Pascal Cabrera
Modératrices
Isabelle Fontaine-Gaspar
Anne Galouzeau de Villepin
Rapporteure
Corinne Goffaux-Dogniez

Document

La synthèse publiée sur cette est un résumé des échanges très riches de cette rencontre professionnelle. Un document PDF en donne une version complète.

Jean-Pascal Cabrera présente le cadre et l’étendue du sujet

Selon le dictionnaire Larousse, le harcèlement consiste à « soumettre à d’incessantes petites attaques ».

Nous pouvons distinguer 7 sortes de harcèlement :

  • Harcèlement scolaire
  • Harcèlement moral et psychologique
  • Harcèlement sexuel
  • Harcèlement physique
  • Harcèlement professionnel
  • Cyber Harcèlement
  • Harcèlement de rue

Notons à propos du harcèlement scolaire qu’il est devenu à présent un délit punissable. Il concerne 10 % de la population scolaire, soit, en France, selon l’Education Nationale, 1.000.000 d’enfants, d’adolescents, de jeunes adultes. Un numéro d’appel de l’Education Nationale (le 3020) permet de dénoncer cette pratique et d’engager la parole à ce sujet avec des personnes compétentes.

Concernant le harcèlement sexuel, c’est un sujet souvent développé dans les médias (informations, sujets de magazine) et qui a donné lieu à des mesures et lois afin de tenter de contrôler son processus dans les groupes et de dissuader les harceleurs potentiels.

Est-ce un phénomène de société ?

Il ne s’agit sans doute pas d’un phénomène « nouveau ». Faut-il considérer que notre société, avec ses caractéristiques propres, le renforce, en augmente l’intensité et/ou/ la fréquence ou que nous en parlons plus actuellement ?…

Nous aurons l’occasion d’échanger au sujet de nos pratiques essentiellement à propos du harcèlement scolaire, du harcèlement professionnel et du cyber-harcèlement. Le harcèlement moral et psychologique étant sans doute la plupart du temps inhérent aux trois harcèlements considérés.

Lorsque le ou la sophrologue est confronté(e), dans sa pratique, au harcèlement, va-t-il le constater ? Faire quelque chose ? Que peut-il conseiller ? A quels leviers psychologiques peut-il faire appel dans sa thérapie ? Quelles techniques sophroniques proposer ?

A. Harcèlement scolaire

Pour la personne harcelée, la peur du regard des autres semble au centre de cette question. Il est intéressant de considérer les choses sous l’angle « regardé-regardant » : comment « je » réagis au regard des autres, qu’est-ce que cela suscite en moi, qui est « je »…, qui sont « les autres », quelle est leur réalité, qu’est-ce que j’attends d’eux, comment je me positionne par rapport à eux.

Ce sont toujours les mêmes qui semblent stigmatisés. Si ce sont des jeunes, ou simplement si c’est possible, il est thérapeutique de chercher à briser cette identification à la personne du harcelé (victimisation : si on me fait vivre cela, c’est que je l’ai mérité parce que je ne vaux rien). D’ailleurs, tant que cette identification n’est pas brisée ou sérieusement revue, elle induit la répétition du phénomène du harcèlement envers une personne donnée.

La dynamique groupale entre élèves est centrale dans le harcèlement et peut mener (elle en est une des causes principales) au décrochage scolaire. Chez les adolescents, la peur devant leurs propres difficultés peut favoriser les phénomènes de projections qui visent à imputer à l’autre ces mêmes difficultés. Elle est à la base de certains comportements sadiques qui peuvent se rencontrer dans le harcèlement.

b. Harcèlement professionnel

Dans la mesure où nous sommes dans la vie professionnelle des adultes, des intérêts (financiers notamment) sont concernés et impliquent que l’approche de ce problème s’accompagne de la connaissance de notions légales. Pour cela, il existe des banques d’adresses, des réseaux, des associations.

Le mécanisme à tenter d’annihiler chez le patient est :

« Je mange de moins en moins » -> « Je dors de moins de moins » -> « Je somatise de plus en plus » -> « Je deviens fou »

Des expériences personnelles sont rapportées, certaines associées à un harcèlement sexuel :

  • Situation-type n°1 : parole bloquée, isolement, honte, culpabilité, peur du scandale si cela se savait (donc ne porte pas plainte).
  • Situation-type n°2 : la personne porte plainte.
  • Situation-type n°3 : la personne est de type « zèbre » : elle cherche à faire la différence entre ce qui est exprimé au premier degré par le harceleur (ou le groupe de harceleurs) et le sens réel de la situation, entre ce qu’elle est et ce qu’elle représente (son identité professionnelle ainsi « scindée » de sa personne, elle se sent plus libre d’exercer sa profession, son identité professionnelle venant au secours de son identité personnelle), elle cherche à être et refuse de se laisser « chosifier », cherche à cerner les enjeux de pouvoir, trouve judicieux de poser à ses harceleurs une question essentielle « méta » qui resitue les protagonistes « harceleurs-harcelé » dans un même camp, avec une même intention, au sein d’une même équipe avec un projet commun, unanimement partagé.
  • Situation-type n°4 : la personne est une perpétuelle harcelée. Depuis sa naissance, elle a enchaîné toutes les formes de harcèlement partout où elle est passée. C’est sa vulnérabilité personnelle qui est en cause.
c. Harcèlement sexuel

Nous sommes à l’époque du cyber-harcèlement dans un paysage d’addiction aux écrans. Nous sommes aussi à l’époque des « nudes ».

L’addiction aux écrans est un phénomène dans lequel la plupart des parents ont eu à un moment ou à un autre, le sentiment d’être dépassés. Pourtant, la meilleure chose qu’ils puissent faire, c’est de ne pas abandonner l’idée de contrôler l’usage des écrans chez leurs enfants et leurs adolescents.

En effet, les enfants qui ont cette chance ont de meilleurs résultats scolaires, un meilleur sommeil, une attention aux cours bien meilleure.

Le smartphone est plus difficile à contrôler, c’est à ce niveau qu’a lieu préférentiellement le cyber-harcèlement.

Sur un plan pédagogique, le jeu-vidéo qui « apprend à harceler » pose questions, il appelle pour le moins un dialogue avec le jeune.

Les « nudes » : la dynamique-type de couple d’adolescents est la suivante : c’est un petit couple d’amoureux, ils ne font rien de bien méchant, tout va bien. Il lui demande de faire une photo déshabillée et de la lui envoyer. Il promet de la garder pour lui, de ne la montrer à personne. Elle le fait parce qu’elle est amoureuse. Puis, ça ne va plus. Ils se brouillent et se séparent. Pour se venger, il envoie la photo à tout leur réseau d’amis, même ceux de l’école.

Notons la vengeance et la facile transmission des images.

Dans ce scénario, toutes les nuances peuvent exister, le sens en est chaque fois différent…

Confrontés à cela, les parents sont concernés dans la mesure où ils peuvent avoir habillé leur fille de manière sexy depuis l’enfance, dans la mesure où ils peuvent juger leur fille : « C’est une pute » lorsqu’ils apprennent le problème. Ils ont aussi pu élever un garçon : libérer la parole est aussi responsabiliser les garçons qui agissent ainsi : leur éducation est aussi importante que celle des filles pour lutter contre le harcèlement sexuel.

Pour conclure

L’aide qui peut être dispensée en situation de harcèlement peut s’avérer considérable pour la santé mentale de la personne harcelée. Elle est aussi particulièrement liée à la notion de « groupe » : le groupe des harcelés dans lequel une dynamique est partie intégrante du phénomène, le groupe dans lequel se déroule le harcèlement (la classe, le milieu professionnel) qui est plus ou moins passif ou actif, mais de toute façon concerné voire même impliqué. L’histoire individuelle et familiale dans le phénomène de harcèlement d’une personne met en lien également la situation à envisager avec une vraie implication, une (re)mise en question personnelle de la part des autres membres de la famille. Cette implication peut amener, par effet collatéral, à une valorisation des liens intra-familiaux et leur approfondissement, leur enrichissement.

Donc, « harcèlement, affaire de groupe ? », la réponse est oui, à plus d’un titre. Et pour notre journée professionnelle, à la Société Française de Sophrologie, nous avons été heureux de nous réunir autour de ce thème qui interpelle pour unir nos réflexions et nos expériences.